Le Selincro agit sur
les récepteurs cérébraux pour réfréner l'envie de boire.
Le nombre d’Européens souffrant d’une dépendance à
l’alcool est estimé à 14 millions, et seulement 8% d’entre eux se soigneraient.
Un médicament pour lutter contre l'envie de boire vient d’être agréé par l’Agence européenne des médicaments. Ce traitement,
conçu par le finlandais Biotie Therapies, est produit à partir d’une molécule
nommée nalméfène. Il agit sur les récepteurs cérébraux. Lundbeck annonce une
réduction de la consommation d’alcool de 60% en moyenne sur six mois de
traitement. Le docteur Philippe Batel, responsable du service de traitement
ambulatoire des maladies addictives à l'hôpital Beaujon de Clichy, nous en dit
plus sur ce médicament.
Francetv info : Il existe déjà des traitements contre la dépendance à l’alcool, en quoi le Selincro est-il différent ?
Francetv info : Il existe déjà des traitements contre la dépendance à l’alcool, en quoi le Selincro est-il différent ?
Philippe
Batel : Premièrement, il vise à la réduction
de la consommation, et non à l’abstinence. Il s’agit d’accompagner le patient
dans des objectifs de soin. C’est nouveau pour un traitement. Ensuite, le mode
d’administration est tout à fait particulier. Il s’agit d’une méthode "à
la demande", c’est-à-dire que le médicament n’est pas avalé de manière
quotidienne, mais quand la personne le décide. Grâce à un accompagnement, le
patient va apprendre à anticiper les situations d’alcoolisation excessive pour
prendre le médicament en amont, environ deux heures avant la prise d’alcool.
Quels
sont les patients visés par ce traitement ?
Si on suit les essais cliniques, ce sont les personnes
concernées par une dépendance faible ou moyenne et qui ne sont pas prêtes pour
l’abstinence. Sont donc exclus les patients qui souffrent d’une dépendance
sévère ou qui présentent des troubles psychiatriques. Mais, personnellement, je
vais le proposer à tous mes patients, même les plus touchés, à partir du moment
où ils ne se trouvent pas dans un projet d’abstinence.
Avez-vous
des réserves concernant la mise sur le marché de ce médicament ?
Oui, les essais cliniques n’ont duré que six mois.
J’aurais aimé une étude sur un temps plus long. On ne sait pas ce qui se passe
pour les patients à la fin de ce traitement semestriel. Ensuite, même si je
trouve séduisant de constater une baisse de la consommation d’alcool grâce au
médicament, j’attends de voir le réel bénéfice sur la santé des patients (dans
le traitement des maladies du foie, notamment). Mais je pense qu'il est fort
probable qu'ils parviennent à démontrer le bénéfice.
Quels
sont les possibles effets secondaires ?
Pour certains patients, il y a quelques nausées et des
sensations de fatigue au début du traitement, pendant trois, quatre jours. Mais
les essais cliniques ont montré que la majorité des personnes continuaient
malgré tout à prendre le médicament.
Propos recueillis par Clément Parrot
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